Je partage ici quelques écrits qui ont un lien avec mes travaux artistiques, parce qu’ils ont été des moments dans ma réflexion sur l’art ou dans ma réflexion sur des enjeux actuels.

(sur les processus de domination et de reconnaissance en art) Les « artistes officiels ». Processus de reconnaissance dans l’art contemporain

(Mémoire, Institut d’Études Politiques – Université de Grenoble 2, 1990)

Résumé : Dans la continuité d’un séminaire sur l’art contemporain qui était organisé en 1989-90 à l’Institut d’Études Politiques de Grenoble, j’ai étudié les processus de reconnaissance à l’oeuvre dans le champ des arts plastiques France, en me focalisant sur le rôle spécifique joué par l’État, notamment depuis l’arrivée de Jack Lang au ministère de la Culture.

Je cherchai alors à comprendre ce qui était pour moi une énigme : comment se faisait-il que certains courants soient reconnus par les institutions et très valorisés sur les marchés de l’art contemporain et par les institutions, alors que d’autres courants sont marginalisés ? Ce questionnement avait certainement à voir avec ma trajectoire, j’avais un peu plus de 20 ans au moment où je soutenais mon mémoire, j’étais attiré par la recherche en sciences sociales, j’étais intéressé aussi par l’art, et l’art contemporain m’intringuait. Je me rappelle d’une discussion avec un professeur de l’École des Beaux-Arts de Grenoble, qui affirmait que la peinture c’était fini, à moins de vouloir être peintre d’icône. Peut-être parce que ma mère et ma grand-mère étaient des peintres, peut-être parce que je suis originaire de Grenoble, je ressentais nettement des processus de domination dans le champ artistique. Je me demandais aussi pourquoi la marginalisation touchait, dans le champ de l’art contemporain, des pays et continents entiers, poussant des artistes à quitter ce qui était alors qualifié de scènes « périphériques », pour des lieux de consécration situés dans certaines grandes métropoles, aux États-Unis et en Europe. Pour esquisser des réponses à ces questions, j’ai ensuite passé trois ans en Grèce et appris le grec moderne. Avant la Grèce, j’ai aussi passé 16 mois à Istanbul lors du service national de coopération (avec ma femme et notre première fille), où j’ai aussi poursuivi l’enquête.

(sur les processus de domination dans l’art, sur la sensibilité à l’art, sur les rapports art/identité) Construction locale de l’identité et universalisme en art. Une sociologie des arts modernes et contemporains en Grèce

(Doctorat de sciences politiques, Institut d’Études Politiques – Université de Grenoble 2, 1999)
https://theses.fr/1999GRE21009

Résumé : J’ai poursuivi ma réflexion sur l’art par une thèse, qui a appréhendé l’art grec à compter des années 1930, à partir d’une démarche de sociologie de l’art. Dans une première partie théorique, j’ai cherché à comprendre le complexe de croyances qui contribue, en Occident, à notre manière de penser l’art, et qui associe le « grand art » à des lieux très spécifiques (les « capitales mondiales de l’art »). Dans les cas de l’art grec (moderne et contemporain), cela contribue à ce qu’il soit perçu comme un art dérivatif ou imitatif. À partir d’une enquête approfondie (étude de terrain de près de deux ans à Athènes, mais aussi à Thessalonique et dans d’autres villes), j’ai étudié comment, au sein du monde grec, des sociétés micro-locales définissent l’art (je m’intéressait alors aux mots utilisés dans la caractérisation des œuvres, notamment par les collectionneurs), et se définissent en retour par le biais de l’art, c’est-à-dire à travers la réception qu’elles font des différents mouvements artistiques. Étudier ceci  impliquait de prendre en compte les conflits symboliques lies à la réception des mouvements artistiques, à la croisée du sociétal et du politique. Il me fallait aussi considérer comment s’était formé un dispositif de socialisation de l’art ou « monde de l’art » (galeries, revues, etc. ). Par cette recherche, j’ai pris conscience de la non-pertinence des théories de la mondialisation dans le champ de l’art, puisque des courants artistiques sont appropriés (ou non) en fonction d’enjeux chaque fois propres à des sociétés.

(réflexion prospective sur le rapport au monde matériel) Les cyber-utopies ou l’hypothèse d’un déplacement de l’accent de réalité vers les univers virtuels, nouveaux « mondes de la vie quotidienne »

2004, Montpellier, Ed. École Supérieure des Beaux-Arts de Montpellier
https://mediatheques.montpellier3m.fr/Default/doc/CAMO/1042095/des-utopies-psychedeliques-aux-cyber-utopies-les-univers-virtuels-nouveaux-mondes-de-la-vie-quotidie?_lg=fr-FR

Résumé : Le terme cyberespace, en germe dès les années 1970 dans les milieux précurseurs de l’Internet, désigne l’espace immatériel, issu de la mise en connexion d’ordinateurs. Davantage qu’un espace de communication, il fait figure, dans la cyberculture, d’espace social en formation où pourrait se dérouler à l’avenir l’essentiel de la vie sociale. J’ai attribué le statut d’hypothèse à ce scénario afin de mesurer sa crédibilité et ses implications. Il semble a priori plausible, si l’on remarque que toute une série d’activités qui se déroulaient uniquement dans le cadre du monde matériel se réalisent partiellement aujourd’hui, du fait du développement des pratiques attachées à Internet, dans le cyberespace : celui-ci est un espace de travail, de formation, de jeux et de loisirs, de relations amicales ou amoureuses. Et il est un fait que le temps passé dans ce type d’espace occupe une partie considérable et croissante du temps éveillé des individus des pays les plus développés. Dans cet essai, j’ai montré comment est apparue la volonté de substituer au monde réel-matériel un monde virtuel, puis tenté de comprendre pourquoi il semble aujourd’hui envisageable d' »habiter » dans les mondes virtuels, après avoir en quelque sorte déplacé l’accent de réalité vers ces univers. Dans mes travaux artistiques, la question du rapport au monde matériel est centrale.

(état des réflexions sur les manières de dépasser la coupure nature/culture) Du dualisme entre nature et culture à une pensée du vivant

article, 2014
https://www.millenaire3.com/ressources/2024/du-dualisme-entre-nature-et-culture-a-une-pensee-du-vivant

Résumé : Dans son ouvrage de référence Par-delà nature et culture (2005), l’anthropologue Philippe Descola identifie dans l’opposition entre nature et culture le principe sous-jacent qui structure la pensée moderne occidentale. Il appelle à s’extraire de ce dualisme, et donne à voir d’autres manières d’être au monde. Depuis la publication de cet ouvrage, on a assisté à des évolutions frappantes, qui laissent à penser que le paradigme dualiste nature/culture s’affaiblit au profit d’une réévaluation du vivant. Cet article propose de faire le point sur la situation, à partir d’une vaste revue de littérature. Cela m’a nourri dans ma réflexion (projet « Constellations » notamment).

(réflexion sur l’avenir de l’universalisme) De l’universalisme abstrait à un universalisme pluralisé

article, 2024
https://www.millenaire3.com/ressources/2024/de-l-universalisme-abstrait-a-un-universalisme-pluralise

Résumé : « L’universalisme des Lumières » est sur la sellette depuis une trentaine d’années, contesté tant en Occident qu’en dehors comme un système de domination, le tout dans un contexte profondément renouvelé, puisque jamais l’Occident n’a été aussi critiqué. Devenu omniprésent dans les débats politiques contemporains, l’universalisme serait à défendre, à abandonner ou à repenser. Dans cette revue de littérature, j’ai choisi d’examiner comment s’ouvre le chantier d’un renouvellement de l’universalisme. Quelles sont les relectures, les recompositions, les alternatives proposées à un universalisme souvent qualifié d’abstrait et d’eurocentré ? Quels sont les modalités et les enjeux de ce renouvellement ?